Claude Guéant relaxé en appel : la fin d’un long parcours judiciaire pour l’ancien ministre de l’Intérieur

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Marc de Versailles Daily
Le 2 octobre 2024 marque un tournant dans la longue saga judiciaire de Claude Guéant. La cour d'appel de Versailles a relaxé l'ancien ministre de l'Intérieur dans l'affaire des frais de campagne présumés frauduleux lors des législatives de 2012. Ce verdict met fin à douze années de procédures qui ont vu l'ex-dauphin de Nicolas Sarkozy condamné à plusieurs reprises avant ce revirement judiciaire. Retour sur une affaire emblématique qui a marqué la vie politique française.

Une affaire née dans le sillage de la présidentielle 2012

L’affaire trouve son origine dans la campagne législative de Claude Guéant en 2012 dans la 6e circonscription des Hauts-de-Seine. Alors ministre de l’Intérieur en exercice, il briguait un mandat de député après la défaite de Nicolas Sarkozy à la présidentielle.

Les premières alertes surviennent en 2013 quand la Commission nationale des comptes de campagne relève des irrégularités :

  • Factures suspectes de prestations de communication
  • Dépenses dépassant le plafond autorisé de 38 000 €
  • Soupçons de surfacturation impliquant des proches du candidat

Le parquet national financier ouvre une enquête préliminaire aboutissant à la mise en examen de Claude Guéant pour « escroquerie en bande organisée » et « abus de confiance ».

2018 : Première condamnation symbolique

Cinq ans après les faits, le tribunal correctionnel de Paris rend son verdict le 16 février 2018 :

  • Claude Guéant est condamné à 1 an de prison avec sursis
  • 20 000 € d’amende et 1 an d’inéligibilité
  • Trois co-prévenus écopent de peines similaires

Le tribunal retient que « l’ensemble des éléments démontre un système organisé » mais reconnaît que « les sommes en jeu restent limitées » (environ 50 000 € selon Le Monde).

2020 : La confirmation en appel

L’ancien ministre fait appel, mais la cour d’appel de Paris confirme le 10 décembre 2020 la condamnation première instance.

Deux éléments notables :

  1. La peine principale est maintenue
  2. Le montant des dommages-intérêts est augmenté à 70 000 €

Claude Guéant se pourvoit alors en cassation, estimant que « la qualification juridique des faits est erronée ».

2022 : La Cour de cassation ouvre une nouvelle voie

Dans un arrêt du 15 juin 2022, la plus haute juridiction judiciaire française :

  • Casse partiellement l’arrêt d’appel
  • Renvoie le dossier devant la cour d’appel de Versailles
  • Estime que certains éléments doivent être réexaminés

Ce revirement procédural redonne espoir à la défense qui y voit « une reconnaissance des faiblesses de l’accusation » (déclaration de Me Bouchez El Ghozi à l’AFP).

2024 : Le retournement final

Le nouveau procès en appel aboutit à un verdict radicalement différent le 2 octobre 2024 :

Motifs de la relaxe :

  • Insuffisance de preuves sur l’intention frauduleuse
  • Incertitudes sur la matérialité des faits
  • Vice de procédure dans l’instruction initiale

La cour versaillaise estime notamment que « les éléments comptables contestés peuvent relever d’erreurs de gestion sans caractère délictueux ».

Réactions politiques et judiciaires

Du côté de la défense : « Cette décision met fin à douze années de calvaire judiciaire. La vérité est enfin rétablie » (Me Philippe Bouchez El Ghozi)

Du côté des parties civiles : « Nous étudions un possible pourvoi en cassation. Ce revirement est incompréhensible au regard des éléments du dossier » (Anticor)

Silence radio : La classe politique dans son ensemble évite de commenter, à l’exception de Nicolas Sarkozy qui salue « la fin d’une épreuve injuste » via son compte Twitter.

Impact et perspectives

Pour Claude Guéant : À 79 ans, l’ancien ministre peut théoriquement retrouver une activité publique, bien que son image reste durablement ternie.

Pour la justice financière : Ce revirement intervient dans un contexte de remise en question des méthodes du parquet national financier, après plusieurs relaxes retentissantes.

Pour la vie politique : L’affaire relance le débat sur le financement des campagnes électorales et les contrôles exercés par la CNCCFP.

Marc Dorier

Marc Dorier est un journaliste chevronné, reconnu pour son expertise dans le domaine des faits divers. Avec plus de quinze ans d’expérience sur le terrain, il couvre avec rigueur et réactivité les événements marquants de la région de Versailles et ses alentours. Son sens aigu de l’investigation et sa capacité à rendre compte des faits avec précision en font une référence dans le milieu journalistique local.