
Une affaire née dans le sillage de la présidentielle 2012
L’affaire trouve son origine dans la campagne législative de Claude Guéant en 2012 dans la 6e circonscription des Hauts-de-Seine. Alors ministre de l’Intérieur en exercice, il briguait un mandat de député après la défaite de Nicolas Sarkozy à la présidentielle.
Les premières alertes surviennent en 2013 quand la Commission nationale des comptes de campagne relève des irrégularités :
- Factures suspectes de prestations de communication
- Dépenses dépassant le plafond autorisé de 38 000 €
- Soupçons de surfacturation impliquant des proches du candidat
Le parquet national financier ouvre une enquête préliminaire aboutissant à la mise en examen de Claude Guéant pour « escroquerie en bande organisée » et « abus de confiance ».
2018 : Première condamnation symbolique
Cinq ans après les faits, le tribunal correctionnel de Paris rend son verdict le 16 février 2018 :
- Claude Guéant est condamné à 1 an de prison avec sursis
- 20 000 € d’amende et 1 an d’inéligibilité
- Trois co-prévenus écopent de peines similaires
Le tribunal retient que « l’ensemble des éléments démontre un système organisé » mais reconnaît que « les sommes en jeu restent limitées » (environ 50 000 € selon Le Monde).
2020 : La confirmation en appel
L’ancien ministre fait appel, mais la cour d’appel de Paris confirme le 10 décembre 2020 la condamnation première instance.
Deux éléments notables :
- La peine principale est maintenue
- Le montant des dommages-intérêts est augmenté à 70 000 €
Claude Guéant se pourvoit alors en cassation, estimant que « la qualification juridique des faits est erronée ».

2022 : La Cour de cassation ouvre une nouvelle voie
Dans un arrêt du 15 juin 2022, la plus haute juridiction judiciaire française :
- Casse partiellement l’arrêt d’appel
- Renvoie le dossier devant la cour d’appel de Versailles
- Estime que certains éléments doivent être réexaminés
Ce revirement procédural redonne espoir à la défense qui y voit « une reconnaissance des faiblesses de l’accusation » (déclaration de Me Bouchez El Ghozi à l’AFP).
2024 : Le retournement final
Le nouveau procès en appel aboutit à un verdict radicalement différent le 2 octobre 2024 :
Motifs de la relaxe :
- Insuffisance de preuves sur l’intention frauduleuse
- Incertitudes sur la matérialité des faits
- Vice de procédure dans l’instruction initiale
La cour versaillaise estime notamment que « les éléments comptables contestés peuvent relever d’erreurs de gestion sans caractère délictueux ».

Réactions politiques et judiciaires
Du côté de la défense : « Cette décision met fin à douze années de calvaire judiciaire. La vérité est enfin rétablie » (Me Philippe Bouchez El Ghozi)
Du côté des parties civiles : « Nous étudions un possible pourvoi en cassation. Ce revirement est incompréhensible au regard des éléments du dossier » (Anticor)
Silence radio : La classe politique dans son ensemble évite de commenter, à l’exception de Nicolas Sarkozy qui salue « la fin d’une épreuve injuste » via son compte Twitter.
Impact et perspectives
Pour Claude Guéant : À 79 ans, l’ancien ministre peut théoriquement retrouver une activité publique, bien que son image reste durablement ternie.
Pour la justice financière : Ce revirement intervient dans un contexte de remise en question des méthodes du parquet national financier, après plusieurs relaxes retentissantes.
Pour la vie politique : L’affaire relance le débat sur le financement des campagnes électorales et les contrôles exercés par la CNCCFP.